1° Édition
Gaza : Le Livre de la Destruction
Le jury, présidé par le photographe et réalisateur William Klein, a choisi l’Allemand Kaï Wiedenhöfer (1966-2024) pour cette première édition sur la bande de Gaza. Photographe multi-primé et arabophone, il répétait que « sans langage, une bonne photographie est impossible », et couvrait depuis très longtemps cette région.

Mona Al-Asqar, 19 ans, blessée lors d’un tir d’artillerie sur l’école de l’UNWRA (Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient) à Beit Lahia le 17 janvier 2009.
© Kai Wiedenhöfer pour la Fondation Carmignac
Entre conflits majeurs et mineurs, guerres de basse intensité et affrontements sporadiques, terrorisme aveugle et répression disproportionnée, trop de pays, surtout au Proche et au Moyen-Orient, vivent dans une situation quasi permanente de bellicosité, intérieure ou extérieure.
Un an après la « Guerre de Gaza » (2008 à 2009), Kai Wiedenhöfer a crûment documenté les dévastations matérielles et humaines de ce territoire. Il montre le vrai visage de la guerre, lorsque personne n’en voit la fin : il dit la douleur perpétuelle, la colère sourde et l’horrible résignation.
C’est avec une profonde tristesse que la Fondation Carmignac a appris en janvier 2024 sa disparition.
Edouard Carmignac« Il faut du courage pour partir à vingt ans photographier l’isolement des gens dans la bande de Gaza. Il faut être déterminé pour y rester 18 mois, puis y retourner régulièrement pendant vingt ans malgré les contrôles frontaliers croissants et le harcèlement constant, jusqu’à ce qu’un mur soit enfin érigé pour séparer les deux peuples. Il faut à la fois du courage et de la détermination pour embrasser la vocation de reporter de terrain et assumer la difficile existence qu’implique une activité qui, aujourd’hui, malheureusement, est gravement menacée ».
Pendant six mois, de novembre 2009 à mars 2010, il procède sur place à un travail documentaire extrêmement méticuleux. D’une grande puissance et d’une apparente froideur, dans la lignée d’August Sander et de « l’école de Düsseldorf », ses images frontales montrent humains blessés et bâtiments détruits et composent un compte-rendu d’une cruelle beauté sur un bout de terre clôturé et meurtri.
La géométrie des cadres, la modestie des couleurs, le refus de tout sensationnalisme ne portent guère à l’optimisme quant à une éventuelle reconstruction, des vivants comme des choses. L’abandon, la tristesse, la dignité nous contemplent, et nous sommes partagés entre l’accablement et le respect pour le photographe et ses motifs, dans tous les sens de ce terme.
Tel Al-Hawa, sud de Gaza, 2009. Réservoir d’eau également utilisé par les troupes israéliennes pendant la guerre.
© Kai Wiedenhöfer pour la Fondation Carmignac
Christian Caujolle, journaliste, auteur, commissaire d’exposition et fondateur de l’agence et de la galerie VU'
Guillaume Herbaut, photographe et membre fondateur de l’agence Œil Public
Fabrice Hergott, directeur du Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris
Jean-Luc Marty, directeur de la rédaction de Géo Magazine
Alain Mingam, photojournaliste, commissaire d’exposition et agent
Vivienne Walt, correspondante du Time Magazine